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François Flahault, Le paradoxe de Robinson, Mille et une nuits, 2005

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C'est par Tzvetan Todorov que j'ai entendu parler de François Flahault, un gars pour le moins bizarre qui est anthropologue mais s'occupe aussi d'histoire, de philo, de linguistique et j'en oublie sans doute.

Le vide de la pensée progressiste auquel nous sommes confrontés correspond à une période de transition entre deux conceptions de l'être humain et de la société. La pensée occidentale se fonde depuis des siècles sur la conviction que l'individu précède la société et que celle-ci se développe avec l'économie - une conception incarnée par la figure de Robinson Crusoé. Or, les connaissances dont nous disposons aujourd'hui convergent vers la conclusion inverse : la vie sociale est à la base du processus d'humanisation, elle précède l'émergence de l'individu, elle est notre milieu naturel. Une véritable révolution des idées ! Qui conduit à penser autrement la place de l'économie dans la société. Il est temps de comprendre le renversement qui s'opère en silence mais qui n'en aura pas moins des répercussions sur la pensée politique.

En deux mots: ce n'est pas l'existence précède l'essence, c'est la société précède l'individu. J'ai trouvé pas mal du tout ce petit bouquin.

Il faudra donc bien en venir à une écologie sociale - second seuil à franchir pour entrer dans l'ère post-prométhéenne. Il faudra bien reconnaître que les configurations sociales et culturelles dont nous faisons partie constituent notre biotope, notre milieu de vie. Il faudra apprendre à les penser comme des écosystèmes plus ou moins riches, plus ou moins vulnérables, formés de réseaux d'éléments interagissants. Des écosystèmes dont la complexité requiert notre attention et nos efforts, tant leur équilibre est vulnérable, tant ils sont sujets à des dérives, des cercles vicieux, des réactions en chaîne destructives. Au lieu de concevoir des individus dotés par nature de leur propre être, on en viendra à penser l'existence même de l'être humain comme inséparable des réseaux dont il est lui-même une maille, réseaux des autres et des choses (matérielles aussi bien qu'immatérielles) dont l'ensemble constitue son milieu de vie. (p. 163)

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