Raoul Vaneigem, L'inhumanité de la religion
Résumé
Il est aujourd'hui de bon ton de parler du retour des religions, en invoquant le renouveau de l'Islam ou en célébrant le deuxième millénaire du christianisme. Or, ce grand spectacle ne fait que meubler le vide que laisse la perte de crédit des idéologies politiques.
Raoul Vaneigem restitue la logique profonde du phénomène religieux depuis ses origines : la religion institutionnelle est étroitement associée à certains systèmes de production économique, depuis l'âge néolithique jusqu'aux formes contemporaines du capitalisme. C'est dans un système où les ressources humaines et naturelles sont converties en profit, c'est-à-dire en valeur abstraite, que se développe le gigantesque système d'aliénation qui définit les religions, quels que soient leur forme et leur nom. Et c'est justement aujourd'hui, au moment où l'économie mondiale atteint son point d'expansion extrême, que la sphère religieuse se vide de sa propre substance et s'achemine vers son propre dépassement.
Note Fred
Excellent petit ouvrage, incisif mais pas incivil, intelligent sans prétention, et d'une grande qualité d'écriture. À lire absolument en ce siècle de triomphe des bigots, tondus ou barbus.
Et je ne peux résister au bon mot de Francis Blanche mentionné dans cet ouvrage: Je préfère le vin d’ici à l’eau de là.
Extrait
On ne détruira pas la superstition universelle sans détruire son support, on ne révoquera pas le mandat céleste sans en finir avec l’économie qui l’a produit et perpétué.
Le judéo-christianisme, l’islamisme, l’hindouisme, le bouddhisme, les sectes et leurs cohortes de rabbins, curés, imams, pasteurs, gourous, bonzes, lamas sont le dernier avatar de dix mille ans d’exploitation de l’homme par l’homme. Ils ne disparaîtront dans le naufrage de la civilisation marchande qu’à la faveur d’une civilisation humaine fondée sur l’affinement des désirs, non sur les mécanismes psychologiques et sociaux d’un système hostile à la nature.