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Stendhal, La chartreuse de Parme

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La politique dans une ouvre littéraire c'est un coup de pistolet au milieu d'un concert: quelque chose de grossier et auquel pourtant il n'est pas possible de refuser son attention.

C'est l'histoire d'un jeune étourdi qui vieillit mais ne s'assagit point.

L’œuvre sera, jusqu’au début du XXe siècle, relativement inconnue en dehors de quelques cercles d’esthètes, de critiques littéraires, ou de personnalités visionnaires (Nietzsche), ce que Stendhal semblait appeler de ses vœux, dédicaçant son roman To the Happy Few.

Honte à moi, je n'avais pas lu cette oeuvre majeure de la littérature française dans ma jeunesse. Grâce à la technologie (merci à ma liseuse), j'ai pu télécharger gratuitement le bouquin depuis le projet Gutenberg.

Je me disais bof (comme disait le beau Serge), tout ça c'est du bluff... bref, je retardais la lecture en m'imaginant le mortel ennui.

Et bien non: Stendhal, c'est juste génial, avec un humour grinçant et persistant, qui vous empare de la première à la dernière page.

J'ai dévoré ce pavé (numérique), ricanant dans mon lit tant et si bien que ma douce s'en est emparé aussi, confirmant mon jugement (avec le sien qui est plus sage).

Pataud, maladroit, débile, égoïste et imbécile, Fabrice, avec sa gueule d'amour, les fais toutes craquer. Toutes. Que â côté James Dean c'est juste du pipeau.

D'après ce que j'en ai lu ensuite, Balzac aurait dit de ce bouquin qu'il s'agissait du monument de la littérature française, notamment la scène de la bataille qu'il aurait aimé avoir l'art de pouvoir écrire comme ce brave Beyle. Et, effectivement, cette errance du jeune Fabrice, avec ses italianismes et son accent italien à couper au couteau, jeune bourgeois ignorant et arrosant les engagés de ses pièces d'or, au coeur de l'action sans jamais avoir l'air d'y toucher est sans doute l'une des meilleures odes anti-militaristes que je connaisse.

- Parbleu! tu n'es pas trop adroit! s'écria-t-il. Il est un peu fort de café que l'on ose nous expédier des blancs-becs de ton espèce!

"Je vais fâcher la personne que j'aime le mieux au monde si je parle, j'aurai l'air d'un mauvais comédien; je ne vaux réellement quelque chose que dans de certains moments d'exaltation." (167).

Souvent il fut obligé de relever la tête pour que ses larmes ne tombassent pas sur son papier. (198)

Après un petit silence, les domestiques se mirent à crier : "Vive Mme la duchesse!"et applaudirent avec fureur. La duchesse, qui était déjà dans la pièce voisine, reparut comme une actrice applaudie, fit une petite révérence pleine de grâce à ses gens et leur dit:

- Mes amis, je vous remercie. (232)

Le comte sortit, au désespoir, du palais Sanseverina: il voyait chez la duchesse l'intention bien arrêtée de se séparer de lui, et jamais il n'avait été aussi éperdument amoureux. C'est là une de ces choses sur lesquelles je suis obligé de revenir souvent, parce qu'elles sont improbables hors de l'Italie. (268)

Le lecteur trouve cette conversation longue: pourtant nous lui faisons grâce de plus de la moitié; elle se prolongea encore deux heures. (273)

Une preuve décisive du mariage, c'est que le marquis immensément riche et par conséquent fort avare, comme c'est l'usage parmi les gens opulents du nord de l'Itali (370)

"Vous allez faire appeler Fabrice et le consulter sur cette démarche qui peut le conduire en prison. Pour tout prévoir, si, pendant qu'il est sous les verrous, Rassi, trop impatient, me fait empoisonner, Fabrice peut courir des dangers. Mais la chose est peu probable; vous savez que j'ai fait venir un cuisinier français, qui est le plus gai des hommes, et qui fait des calembours; or, le calembour est incompatible avec l'assassinat." (402)

- Tais-toi, Gonzo, tu n'es qu'une bête. (451)

(ce Gonzo n'est pas si sot, puisqu'il sait le profit qu'il peut tirer de ses petits secrets, et ne les divulger qu'aux puissants; et j'ai enfin compris pourquoi on surnommait un camarade au collège "Gonzo")

Quant à Clélia, à peine eut-elle entendu les dix premières lignes de la prière lue par Fabrice, qu'elle regarda comme un crime atroce d'avoir pu passer quatorze mois sans le voir. En rentrant chez elle, elle se mit au lit pour pouvoir penser à Fabrice en toute liberté; et le lendemain, d'assez bonne heure, Fabrice reçut un billet ainsi conçu:

On compte sur votre honneur; cherchez quatre braves de la discrétion desquels vous soyez sûr, et demain au moment où minuit sonnera à la Steccata, trouvez-vous près d'une petite porte qui porte le numéro 19, dans la rue Saint-Paul'. Songez que vous pouvez être attaqué, ne venez pas seul.

En reconnaissant ces caractères divins, Fabrice tomba à genoux et fondit en larmes.

- Enfin! s'écria-t-il, après quatorze mois et huit jours! Adieu les prédications. (457)

(et Fabrice abandonne la robe pour se lancer dans le stupre et la fornication...)

- Mon cher ange, je ne prêcherai plus devant qui que ce soit; je n'ai prêché que dans l'espoir qu'un jour je te verrais.

- Ne parle pas ainsi, songe qu'il ne m'est pas permis à moi de te voir.

Ici, nous demandons la permission de passer, sans en dire un seul mot, sur un espace de trois années. (458)

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